Cet article intervient en complémentarité avec l’article paru sur Le Figaro le 28 novembre 2021.
De prime abord, la procrastination a l’air d’un sujet un peu léger. En fait, il mérite qu’on s’y intéresse car non seulement le mot est sur des bouches de plus en plus nombreuses, mais lorsque l’on l’entend, il est vécu comme un symptôme, la personne concernée s’en sentantvictime. Derrière le constat de la procrastination, vient vite la culpabilité. Celle de ne pas faire immédiatement ce qu’il y a à faire.
Alors si c’est un phénomène collectif ET générateur de souffrance, c’est un sujet sociétal.
Chez Wunjo on écoute et on s’intéresse à tout ce qui peut fabriquer du mal-être au travail. Et si l’on parle beaucoup d’environnement pathogène, de conditions de travail délétères, de management pas suffisamment bienveillant… On voit et on sait aussi que les travailleurs sont très forts pour se faire mal tous seuls. Car il nous semble que la plupart des procrastinations sont constatées et déplorées par la personne concernée que par son management…
Voici le point de vue de notre fondatrice, Emmanuelle BESSEZ, ses conseils pour accueillir, gérer et prévenir la procrastination.
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Conseil 1 – Vérifiez que ce que vous faites s’appelle bien de la procrastination.
Rappelons la définition : « c’est l’acte de différer une tâche », de la « remettre au lendemain » (ou à dans 5 minutes !).
Alors posez-vous la question : est-ce que ce que vous êtes en train d’ajourner était vraiment urgent, c’est-à-dire programmé à « maintenant » ? Il faut distinguer l’urgent de l’important.
Temporiser l’appel à un prospect n’est pas la même chose que reculer son arrivée en réunion ou de laisser une collègue en difficulté attendre votre aide…
Faisons d’abord des distinctions pour ne pas tout prendre pour des actes de procrastination. Ne nous laissons pas submerger par le culte de l’immédiateté et l’ultra-exigence de la réactivité.
2e conseil :
Si je procrastine vraiment, demandez-vous si c’est grave.
Est-ce un vrai problème ? Objectivement parlant. Quelles sont les conséquences ? Les impacts pour moi et pour mon entourage professionnel ?
S’ils sont très raisonnables, que votre procrastination n’est pas bien grave… alors ce n’est pas autant un sujet donc on relativise !
Si ce n’est pas le cas… alors il faut passer au 3e conseil.
Conseil 3 :
Je procrastine et ça craint. Je culpabilise très vite. Je me créé une pression supplémentaire, du stress. L’inverse de ce qui génère de la sérénité et de l’envie.
Alors on conseillera d’accueillir l’état de fait. Il n’y a pas l’énergie et l’envie ici et maintenant. Accepteé que c’est ce que votre corps demande à ce moment-là. Respirez et autorisez-vous.
Conseil 4 (qui va avec le précédent !) :
Et si vous changiez de regard sur la procrastination ?
Est-ce que vous avez l’obligation d’être productif tout le temps ? Non… ou alors si c’est le cas, c’est une vue de l’esprit, l’être humain n’en est pas capable.
Et puis, est-ce que procrastiner maintenant peut vous permettre d’être très efficace tout à l’heure ? Certains sont câblés « urgence », savent donner le meilleur d’eux-mêmes uniquement dans le speed. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde.
Alors, si cela n’est pas votre cas et que vous procrastinez pas mal, allez vite au conseil 5.
Conseil 5 :
Vous savez que vous procrastinez, et vous savez aussi que vous n’allez pas pouvoir procrastiner toute la journée. Alors pensez « équipe ». Evaluez avec vos collègues l’urgence de la tâche.
Et prévenez-les de votre tendance à procrastiner : être dans la prévention évitera de contaminer votre entourage, de lui créer du stress. Pensez à les rassurer que la tâche sera faite quand même:) et dans le timing imparti. Et tenez votre engagement : il en va désormais de votre fiabilité.
Conseil 6 :
Il est temps d’aller regarder le problème. Plus exactement d’en comprendre la source. Pour quelle raison êtes-vous en train de déporter cette tâche ? C’est quoi votre problème avec elle ?
Clairement, on remet une activité à « quand on aura envie de s’y mettre ». La procrastination est une crise de l’envie. Du plaisir. Du moteur. De la motivation.
Donc posez-vous les questions qui suivent, et essayez d’y répondre honnêtement :
– qu’est-ce qui me déplaît dans cette tâche ?
– comment puis-je diminuer cet inconfort ?
– et sur l’autre côté de la balance : qu’est ce qui me plaît dans cette tâche ? Où puis-je y trouver du plaisir ?
Parfois juste s’interroger permet de reconnecter l’énergie.
Et parfois il y a des problèmes plus profonds : la peur de l’échec ou de la difficulté, parfois (même si cela peut paraître fou !) la peur de la réussite. Ou encore la déconnexion au sens profond de l’action, celle qui donne des perspectives, de la visibilité, la sensation d’œuvrer dans quelque chose de plus grand que nous.
Conseil 7 :
Êtres de plaisir, nous pouvons être motivés ET détournés de notre concentration. Il y a de nombreuses sources de distraction qui peuvent cannibaliser notre attention donc notre temps. Smartphones qui bipent, réseaux sociaux qui clignotent… Cette addiction qui fait perdre la notion du temps, qui nous happe sur des flux indéfinis, qui sait capter notre attention, nourrir notre besoin de lien.
Là il s’agit de s’auto-reguler, d’être son propre « parent ». S’interdire d’ouvrir les fenêtres sur l’ordinateur, éloigner son téléphone. Ou alors se fixer un créneau d’usage raisonnable. Et c’est valable pour les pauses café…
Conseil 8 :
Organise-vous. Chacun a son rythme, et la modularité qui lui convient. Si vous connaisse votremode de fonctionnement, ce qui vous met en énergie, vous génère du plaisir, vous permet de trouver des ressources pour faire confortablement des efforts… alors, vous pourrez organiser votre planning. Par exemple : d’abord une tâche qui va vous « mettre en marche », aiguiser vos neurones. Puis une seconde qui sera plus cool. Puis la 3e, plus « challengeante ».
Certains fonctionnent en mode effort-récompense. Alors à chaque tâche qui coûte, programmezjuste ensuite une activité qui fait kiffer.
Conseil 9 :
Si ça dure, qu’être en mode retard chronique nuit à votre productivité, à celle de votre entourage professionnel, de votre équipe. Et si vous en souffrez, même un peu… Alors considérez qu’agir c’est aussi s’exprimer. Nous vous conseillons d’en parler, d’oser dire ce qu’il se passe. Demander de l’accueil, des conseils, du soutien. Se rendre compte peut être qu’on n’est pas seuls à vivre ça. Expérimenter des solutions qui sont celles des autres, et apprendre sur soi.
Conseil 10 :
Et pour finir, il s’agit d’être honnête avec soi autant que possible. Si la procrastination perdure, s’amplifie, fait des dégâts… Il est alors temps de vous poser la question fondamentale du sens du job que vous exercez.
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